Revue de presse 06/2022
Art & Littérature
Le dessinateur Emile Bravo a reçu le Fauve de la meilleure série au Festival BD d’Angoulême pour sa tétralogie Spirou ( dont je vous parlais ICI ). Le dernier tome est paru fin mai.
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J’ai lu une très intéressante interview dans le magazine La Croix L’Hebdo ( N°133 - propos recueilli par Stéphane Dreyfus ).
Le dessinateur revient sur sa technique en ligne claire ainsi que sur les motivations du récit dont il fait un récit initiatique posant des questions morales, existentielles, en confrontation avec le réel de la guerre et de l’Occupation. Il nous parle également de son histoire familiale, de ses propres questionnements d’enfance.
En voici quelques extraits :
- par rapport au personnage de Spirou : « J’ai eu envie de m’interroger sur l’évolution de la personnalité de Spirou. Il naît en 1938 sous les crayons de Rob-Vel. Mais la publication de ses aventures s’arrête lors de la guerre. Le jeune groom maladroit des débuts devient un intrépide aventurier lorsque André Franquin le reprend en 1947. Comment et pourquoi ? [...] La tétralogie L’Espoir malgré tout aborde sa construction à travers un traumatisme, celui du conflit de 1939-1945.»
- par rapport à la mémoire familiale : « Mon père était un réfugié de la guerre d’Espagne. Lors de la Redirada, il a été interné dans un camp à Argelès-sur-mer. [ La Redirada, c’est 450 000 réfugiés espagnols qui rejoignent la France où la majorité sont placés dans des camps d’internement ] Quand la guerre d’Espagne a éclaté, il avait 19 ans. Il était dans la cavalerie. En 1937, à 20 ans, il a été nommé lieutenant, car les républicains manquaient d’officiers. Sans aucune expérience militaire, il s’est retrouvé face à des chars allemands et italiens, bombardé par la légion Condor.
- A propos du dessin pour raconter une histoire : « Notre premier mode d’expression est le dessin. Notre écriture vient du dessin. Sans lui,il n’y a pas d’écriture. Ils sont complémentaires. Si, dès la primaire, on expliquait ça aux enfants, si on arrêtait de dénigrer le dessin comme quelque chose de puéril, tout le monde continuerait à échanger à travers ce mode d’expression efficace et universel. Depuis le XIXème siècle, on fait commencer l’histoire avec l’invention de l’écriture. Mais les hiéroglyphes, c’est quoi ? De l’écriture et du dessin ! Comprendre son histoire, c’est y intégrer son enfance. Comprendre l’histoire, c’est y intégrer l’enfance de l’humanité, et donc le dessin.»
Je ne peux que vous recommander à nouveau cette tétralogie, ainsi que l’album ( datant de 2007 - scénario Jean Regnaud - Gallimard ), un album délicat sur le deuil : Ma maman est en Amérique, elle a rencontré Buffalo Bill.
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Catégorie Beaux Livres : une édition de la BNF : 100 chefs d'oeuvre de la Bibliothèque Nationale de France, découvrant des trésors des collections, comme un avant-goût à l'ouverture du musée sur le site Richelieu en septembre prochain ( site historique restauré, dix ans de travaux ).
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Ce livre met à l'honneur le fleuron des collections de la BnF, de l'Antiquité à nos jours. À travers cent pièces maîtresses, il offre un panorama de la richesse et de la diversité des œuvres conservées: objets antiques, estampes, peintures, cartes et plans, manuscrits, livres rares, photographies...Au-delà de ce choix d'œuvres exceptionnelles, l'ouvrage permet de parcourir, à partir des collections de la BnF, l'histoire intellectuelle, littéraire et artistique, de l'Antiquité au XXIe siècle.
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La citation du jour : « L’art ne reproduit pas le visible, il rend visible.» - Paul Klee
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Choeur d’Arty Show :
Deux expositions photographiques qui se complètent :
Musée de la Libération jusqu’à la fin de l’année Femmes photographes de guerre : parcours de huit femmes photographes présentes sur des conflits de 1936 à 2011, dont les photographies sont parues dans les grands titres de presse. L’exposition s’ouvre sur Gerda Taro. Belle exposition ( superbe catalogue également ) que je vous recommandais lors de ma lecture de Une longue nuit mexicaine.
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- photographie Christine Splengler - Bombardement de Phon Penh, Cambodge, 1975 -
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Musée de l’Armée - Photographies en guerre -
Un parcours chronologique ( depuis 1849 ) présente plus de 300 photographies contextualisées, de l’iconique à l’inédite. Le principe n’est pas de « montrer» la guerre mais d’interroger le rapport guerre-images, la fabrication de l’image, le métier de photojournaliste. Les photographies rendent réel, documentent, témoignent, mais elles peuvent aussi être manipulées, servir d’arme, orienter le regard.
L’exposition revient sur cette construction de l’image, son utilisation, son impact, notamment à l’heure numérique et des photographies privées déversées instantanément sur les réseaux sociaux.
Un article intéressant dans le magazine L’Oeil ( N°754 - mai 2022 ) sur qu’est-ce qu’être reporter de guerre, avec des témoignages de photographes d’expérience et de renom sur les nécessités et l’évolution de leur rôle.
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A propos de Mexique :
- Au musée de l’Image d’Epinal, la première rétrospective en France du prolixe caricaturiste Jose Guadalupe Posada ( 1852-1913 ), de ses calaveras, figures transgressives et satiriques de squelettes : Posada. Génie de la gravure - jusqu’au 18 septembre ICI -
Un article sur Posada ( avec des visuels ) ICI -
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- Au Palais Galliera ( musée de la mode de la ville de Paris ) est annoncée pour septembre une exposition autour de Frida Kahlo, au-delà des apparences - ICI -
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Je termine avec l'exposition Allemagne années 1920 au Centre Pompidou ( jusqu'au 5 septembre ). Elle est incroyable pour qui s’intéresse à la période ( follement moi ), dense et substancielle ( faut que j’y retourne ) ( je n'ai pas pu tout prendre à la librairie ) ( voici le pourquoi Feininger et Klee pour cette revue de presse ).
Il s'agit de cette période particulière de la république de Weimar, celle de la Nouvelle Objectivité ( Otto Dix, George Grosz... ). L'exposition se fait pluridisciplinaire, avec la peinture, affiche-montage-collage, photographie, design et architecture ( c'est l'époque du Bauhaus, juste présent sans que le parcours s'y attarde ), cinéma, théâtre, etc. Tous les grands thèmes sociétaux en panorama et perspectives de cette génération critique, avec une exposition dans l'exposition : les photographies de la série Hommes du XXème siècle d'August Sander en galerie monographique ( j'avais écrit un article ICI ).
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- Otto Dix - 1925 -
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- Suite au prochain épisode -
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Commentaires
1 A_girl_from_earth Le 10/06/2022
(magnifique aussi la photo de Christine Splengler ! C'est presque dramatique de dire ça d'une photo de guerre)
marilire Le 10/06/2022
2 Autist Reading Le 11/06/2022
Comme A girl from earth, ça me fait mal de trouver magnifique la photo de C. Spengler.
Et, à propos de photographie, je ne me souviens plus quelle autre exposition collective j'étais allé voir il y a déjà quelques années à Beaubourg, mais là aussi, ils avaient consacré tout un espace au travail de Sander qui me fascine, comme ces autres travaux à la dimension documentaire/d'archive de Blossfeldt ou de Bernd et Hilla Becher.
marilire Le 15/06/2022
3 Alys Le 11/06/2022
C'est vrai que ça a l'air tellement bien ces Spirou.
marilire Le 15/06/2022
4 keisha Le 13/06/2022
Quand au spirou, j'ai aimé les deux premiers tomes, faut que je termine la série maintenant (et je confirme, elle est à lire!)
marilire Le 15/06/2022
5 nathalie Le 19/06/2022
marilire Le 20/06/2022