Ennuagements
Pour ce rendez-vous poétique du mois d'avril, ma complice Anne et moi vous proposons de la poésie belge.
Connaissez-vous le Centre Wallonie-Bruxelles à Paris ? Situé tout près de Beaubourg, il s'agit de deux espaces, l'un consacré à des expositions, l'autre est un bel espace librairie. Il est toujours agréable de 'y rendre, de farfouiller, de discuter. Il n'y a que l'embarras du choix, mille découvertes autour des livres ( auteur, éditeur ). Pour la poésie, plus de deux bibliothèques, autant vous dire que j'y suis restée un petit moment. Le libraire a été d'une grande patience et diligence, il y avait une jolie pile qui se formait devant moi.
Je suis partie avec un recueil du poète contemporain Yves Namur, également médecin, membre de l'Académie Royale de Langue et de Littérature francophone de Belgique. Il a signé des anthologies, certaines avec la poétesse Liliane Wouters.
Je cherchais un recueil tout en délicatesse et fraicheur pour un moment poétique en douceur, sans occulter la douleur, parfois, la solitude. Le titre de ce recueil m'a interpellée : Les ennuagements du coeur. Et le livre est un cadeau, sur papier parchemin, les pages à couper, ce geste, une lenteur et une concentration avant de lire.
En première lecture, j'ai lu ce poème, en guise de quatrième de couverture :
La rose
Et le promeneur fatigué sont là.
Qui écoutent le merle
Et les solitudes noires du pré.
L'un et l'autre sont assis
Au bord de l'herbe, au bord de la pensée,
Tout au bord du vide.
L'un et l'autre,
Comme autant de cristaux et de cendres
Qui se souviendraient encore de l'étoile jaune.
L'un et l'autre regarde le monde
Et cette douleur
Cachée dans la bouche des hommes.
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Il est magnifique ce recueil, qui s'ouvre sur des vers d'Höderlin, au plus proche de la nature. Il y a des arbres et des oiseaux, les yeux levés vers le ciel, nos tristesses, nos absents-absences, une gravité et une rose. Ces pages reviendront sur mes pages. Vous pouvez lire l'article, signé Laurent Demoulin, qui le présente ICI : " Namur, même s’il recourt à de très nombreuses métaphores, n’a en tout cas rien d’un hermétique. Et la première sensation que donne la lecture de son recueil est une sensation de douceur, de paix intérieure, et non d’angoisse mallarméenne."
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Que la rose soit nourrie de regrets
Ou du simple bourdonnement de l'abeille,
Qu'elle soit fermée sur l'obscurité
Ou sur les ailes du froid,
Qu'elle parle dans la maison vide
Ou qu'elle donne sa voix aux oiseaux,
Qu'elle pleure, qu'elle danse
Ou qu'elle marche sur nos blessures,
Peu importe ce que fait aujourd'hui la rose
Ou ce qu'elle ne fait pas,
Peu m'importe tout cela
Car maintenant je le sais bien,
Seule une rose peut faire grandir un poème
Et le coeur d'un homme.
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A celui qui baissait les yeux,
A l'humble comme le sont les moineux de la haie,
Au muet et au sourd comme sont nos oreilles
Et notre langue liées,
A qui passait ainsi son chemin
Sans même oser lever la tête,
A celui-là l'arbre dit :
" C'est à toi, pèlerin sans chemin,
C'est à toi seul que je donne tout,
Tout ce que j'ai aujourd'hui
Et tout ce que je ne possède pas.
Car ainsi en est-il des choses qu'on regarde
Comme des choses que l'on ne voit pas encore,
Je te le dis
Seul importe vraiment le regard du dedans. "
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- Les ennuagements du coeur - Yves Namur - Editions Lettres Vives - Collection Terre de Poésie -
- Merci à Jean-Michel Folon -
- Anne vous présente le recueil For Interieur de Thierry Weerts -
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Avec un bouquet de roses pour un anniversaire
- Vincent Van Gogh -
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Commentaires
1 Ingannmic Le 06/04/2022
marilire Le 07/04/2022
2 Aifelle Le 06/04/2022
marilire Le 07/04/2022
3 Anne Le 06/04/2022
marilire Le 07/04/2022
4 Dominique Le 06/04/2022
marilire Le 07/04/2022
5 A_girl_from_earth Le 07/04/2022
marilire Le 08/04/2022
6 niki Le 08/04/2022