Ciné janvier 23
- Deux films catégorie Coup au/de coeur -
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- De Olivier Hermanus avec Bill Nighy - 28 décembre 2022 -
Un film d'une belle délicatesse. Il se déroule à Londres, au début des années 50. Mr Williams est un fonctionnaire de mairie âgé et efficace, responsable d'un bureau. Veuf, père d'un fils marié qui vit avec son épouse à son domicile, il mène une vie réglée jusqu'à ce qu'un examen médical lui révèle qu'il lui reste peu de temps à vivre. Cette nouvelle l'incite à perturber son quotidien, à s'interroger sur ce mot Vivre. Bill Nighy est magnifique dans ce rôle, sans pathos facile. Je garde le souvenir d'une scène dans un bar durant laquelle il chante une chanson d'enfance écossaise avec beaucoup d'émotion ( cette chanson est reprise dans le générique par une chanteuse à la voix cristalline, superbe ).
Ce film est tout en pudeur, tout en images et intériorité, bien que l'on y voit la reconstruction de Londres après la guerre ainsi que cette société si retenue et si cloisonnée. Si Mr Willimans s'égare à l'annonce du diagnostic médical, tentant de vivre dans une forme d'excès dans le Londres nocturne après avoir envisagé le suicide, ce qui est fin, c'est son constat que cette vie routinière est la sienne, qu'elle est celle qu'il a voulu même s'il n'a pas perçu à quel point les années passaient si vite. Devenir un gentleman, un homme consciencieux, était son souhait et son but, et c'est sa réussite. Expérimenté, il connait les rouages administratifs, les blocages et les absurdités façon Chateau de Kafka, les dépasser sera la mission qu'il se donne avant de mourir, modestement, à sa mesure, en se démenant pour l'aménagement d'une petite aire de jeux pour enfants dans un quartier sinistré. Il y trouvera chaleur humaine et accomplissement. La beauté du film tient également aux personnages secondaires qui l'accompagnent, un jeune employé nouvellement embauché auquel il laissera comme un héritage par son attitude et une jeune femme ex employée avec qui il parviendra à parler.
le scénario est signé par Kazuo Ishiguro. L'inspiration japonaise, notamment l'esthétique, y est évidente, d'autant que ce film est un " remake " du film Vivre de Akira Kurosawa, datant de 1952, transposé à Londres à la même époque. Je n'ai pas été étonnée de lire le nom de l'écrivain Kazuo Ishiguro au générique. Ce film m'a rappelé l'atmosphère du roman ( et de son adaptation cinématographique ) Les vestiges du jour.
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En voyant les scènes du début du film, dans le Londres des années 50, cette foule d'hommes en costume sombre-chapeau melon déferlant dans les rues, je n'ai pu m'empêcher de penser à Magritte.
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- Par Alain Ughetto - Animation - 25 janvier 2023 -
Je ne peux que vous recommander avec insistance ce magnifique film d'animation que j'ai déjà envie de revoir.
Il relate l'histoire de l'immigration italienne en France. Le réalisateur revient sur l'histoire de sa famille, celle de ses grands-parents, originaires du Piémont. C'est la présentation lors du générique, sa voix sur les images de cette région du nord de l'Italie, le retour au village abandonné. Sa grand-mère lui racontait que dans ce village nommé Ughettera, tout le monde s'appelait Ughetto, comme lui. Dans ce paysage de montagne, ingrat, c'était une vie de misère. Les hommes et les enfants se louaient, travailleurs saisonniers. Là-bas, le réalisateur-narrateur ramasse ce qu'il trouve, du charbon, des chataignes, de la terre, qu'il ramène. Sa collecte sera intégrée aux décors qu'il crée pour ce film.
Les personnages sont des marionnettes, les décors de cartons, de tissus, de jouets, de morceaux de sucre pour les briques, pour la neige, les morceaux de charbon pour les montagnes, des brocolis pour les arbres. Un univers qui semble enfantin. L'idée originale et touchante du scénario est la présence de ce narrateur-réalisateur dans le film. Filmant la marionnette de sa grand-mère Cesaria, le récit se déroule sous la forme du dialogue qu'il entretient avec elle, mettant en scène le personnage qu'il n'a pas connu, son grand-père Luigi. C'est le film dans le film, sa main, disproportionnée, apparaît à l'écran, pour lui tendre des objets, placer des décors. La main construit au fil du film ( découpage, collage... ). Et c'est sa voix, ses questions, et la voix de sa grand-mère qui raconte cette génération d'Italiens, celle de son mari, et c'est l'histoire de l'Italie en filigrane : la guerre coloniale, le rude travail sur les chantiers, la première guerre mondiale, la grippe espagnole, l'embauche en Suisse puis en France, le poids de la religion, la famille qui s'agrandit, jusqu'à la montée du fascisme, l'intégration en France; beaucoup d'émotions, des sourires et des larmes, et beaucoup d'amour.
“Ce qui m’intéressait, c’était de remonter le cours du temps pour lier mémoire intime et évocation historique, déclare Alain Ughetto. Aujourd’hui, derrière mon nom, j’ai trouvé un récit, la chronique d’une famille parmi des centaines d’autres.”
La créativité en hommage.
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Commentaires
1 Sandrine Le 31/01/2023
marilire Le 31/01/2023
2 Aifelle Le 31/01/2023
marilire Le 31/01/2023
3 Ingannmic Le 31/01/2023
Je suis allée voir Babylon, sur l'insistance d'un ami qui a tellement aimé qu'il y est allé deux fois... bon j'aurais dû me méfier, nos affinités cinématographiques étant très variables. Je dois admettre que je ne me suis pas ennuyée (et pourtant, 3h08 !) car le film a un côté spectaculaire et échevelé qui capte l'attention, mais une fois sortie, je ne savais pas trop ce que j'en avais finalement retenu..
marilire Le 31/01/2023
4 niki Le 31/01/2023
marilire Le 31/01/2023
5 Autist Reading Le 31/01/2023
Je suis un peu moins fan des films d'animation en général, mais je regarderai d'un œil curieux "Interdit aux chiens et aux Italiens" si jamais l'occasion se présente.
marilire Le 01/02/2023
6 Passage à l'Est! Le 31/01/2023
marilire Le 01/02/2023
7 Alys Le 04/02/2023
marilire Le 05/02/2023