Une rançon - David Malouf
- Albin Michel - 2013 -
- Traduit de l'anglais ( Australie ) par Nadine Gassie -
Une rançon marque le retour au roman de l'immense écrivain qu'est l'Australien David Malouf, prix Femina étranger pour Ce vaste monde. Il réinterprète ici magistralement l'une des scènes les plus célèbres de L'Iliade. Celle où Priam, du haut des murs de Troie, assiste à la profanation du corps d'Hector, traîné derrière le char d'un Achille rendu fou de douleur par la mort de son ami Patrocle. Prêt à tout pour récupérer le cadavre de son fils, le vieillard, dépouillé des attributs de la royauté, se dirige alors vers le camp des Grecs dans une simple charrette tirée par des mules.
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Après L'infinie patience des oiseaux ( chronique ICI ), je poursuis la lecture des romans de l'écrivain australien David Malouf. Quel plaisir de lecture ce titre là. La prose est splendide, le récit prenant, bouleversant, offert à tant d'humanité, de réflexions.
Ce roman s'inspire de L'iliade d'Homère. Il en reprend le célèbre épisode de la mort d'Hector tué par Achille. Le guerrier Achille, le vieux roi Priam, c'est ce face à face que racontent ces pages, et bien plus, bien au-delà.
D'abord, ce roman nous parle de deuil, du cycle de la vengeance, de filiation. Il rappelle la fraternelle amitié entre Patrocle et Achille, la mort du premier vaincu par Hector, épisode qui déclenche la suite. Le récit s'ouvre sur cette souffrance d'Achille, sa fureur, son désespoir, sa solitude. C'est cela, la solitude humaine; des pages de toute beauté, mélancoliques, nostalgiques, face à la mer.
Les premières lignes :
" La mer a de nombreuses voix. Celle que cet homme cherche à entendre est la voix de sa mère. Il lève la tête, tend son visage à l'air glacial qui arrive du golfe, et goûte l'âcreté du sel sur ses lèvres. Le ventre de l'eau s'enfle et scintille, bleu-argent moiré, membrane étirée jusqu'à la claire transparence où naguère, durant neuf changements de lune, il a flotté, recroquevillé dans un rêve de préexistence, été bercé, réconforté. Il s'accroupit maintenant sur les galets en pente douce du rivage, ramène les pans de son manteau entre ses genoux. Menton baissé, épaules voûtées, attentif. "
Ce roman est magistral. En cinq parties comme une tragédie en cinq actes, avec des visions du passé et de l'avenir comme un choeur les raconterait, le récit parvient à placer les hommes au coeur même de leur conditions, aussi puissants que mortels, agissants et fugitifs à l'échelle du temps, de l'Histoire qui s'écrira. David Malouf leur donne corps et âmes. Un souffle épique, lyrique, traverse ces pages, sans jamais occulter la dimension humaine, et pourtant une sobriété, une pudeur, pour ces drames intimes révélés. Achille et Priam, des hommes, des fils, des pères; des hommes ayant un rôle prestigieux, tenus de tenir ce rôle. Sur ces pages, c'est le coeur que l'on entend, le coeur qui (se) bat, la fatalité aussi, une conscience ( préscience ? ) de l'Histoire.
Ce dont il est question, c'est de liberté, de volonté humaine. Cette façon d'appréhender les évènements bouleverse de la part de Priam " lui qui a toujours été si respectueux de la loi et de l'ordre établi. ", de celui qui a toujours paru ce qu'il doit paraître - " telle est la discipline des rois " " ne rien laisser transparaître de l'homme véritable tapi à l'intérieur d'une coquille si brillante et si vide " -
- Une rançon de David Malouf est recommandé par Anne et Dominique -
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Commentaires
1 Kathel Le 07/02/2020
marilire Le 08/02/2020
2 Anne Le 07/02/2020
marilire Le 08/02/2020
3 krol Le 08/02/2020
marilire Le 08/02/2020
4 Dominique Le 10/02/2020
merci à toi pour le lien
marilire Le 10/02/2020
5 Tania Le 12/02/2020
marilire Le 14/02/2020
6 Passage à l'Est! Le 18/02/2020
marilire Le 19/02/2020
7 Praline Le 13/04/2020